Vert ~ Histoire d'une couleur
Michel Pastoureau
2013
Présentation
L'historien des couleurs Michel Pastoureau nous raconte l'histoire européenne de la couleur verte. Couleur difficile à fixer sur les vêtements (les teintures ayant longtemps été d'origine végétale), le vert symbolise l'instabilité, le changement, le hasard (cf le tapis vert dans les casinos). Couleur tout à fait ambivalente : courtoise et d'espérance, et en même temps diabolique et maudite (cf superstition théâtrale). Un temps mis de côté par la science (n'étant pas une couleur primaire, mais produite à partir du jaune et du bleu), le vert amorce son retour à la fin du XVIIIe s. (avec le romantisme par le truchement de la végétation) puis depuis la fin du XXe s. en tant que couleur du mouvement écologique. Bref une couleur aujourd'hui au centre de toutes les attentions.
Citations et vocabulaire
Animaux et plantes
30
Quant au hiéroglyphe qui représente la couleur verte, il a en général la forme d'une tige de papyrus, dont la symbolique est toujours positive.
30
Les teinturiers […] ont-ils mordancés différemment un produit qu'ils connaissaient de longue date (fougère, nerprun, feuilles de prunier, jus de poireau) ?
n.m. #Teinturerie Les nerpruns sont des arbustes ; ils font partie de la famille des rhamnacées. De la baie de certaines espèces de nerpruns, on extrayait autrefois un colorant. Taxon : Rhamnus
38
Néron aime le vert, les émeraudes, la verdure et les poireaux.
POIREAU, X
n.m. Poireau cultivé : variété de poireau perpétuel ; légume, consommé aussi bien froid (avec de la vinaigrette) que chaud, entrant dans la composition de différentes tartes (p. ex. la flamiche). Taxon : Allium ampeloprasum var. porrum
71
L'if est vénéneux et, planté dans les cimetières, associé à la mort.
n.m. « If commun : [arbre du genre des taxus] qui, taillé de diverses manières, s'emploie pour la décoration dans les jardins dessinés à la française et dans les cimetières. » dixit Académie 8 Taxon : Taxus baccata
71
L'aulne pousse dans les marais, là où aucun autre arbre ne pousse, et son bois rougeoyant semble saigner.
n.m.
- Les aulnes (ou aunes) sont des arbres poussant sur les sols humides ; ils font partie de la famille des bétulacées. Taxon : Alnus
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71
Le noyer, son ombre passe pour empoisonnée et ses racines aiment à se diriger vers les étables pour faire périr le bétail.
n.m.
- Les noyers constituent un genre d'arbres de la famille des juglandacées ; leur fruit est la noix. Taxon : Juglans
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83
Le tilleul est l'arbre vedette de la pharmacopée médiévale, au point qu'en allemand le nom du tilleul (Linden) a donné naissance à un verbe signifiant soigner ou soulager (lindern).
n.m. Les tilleuls sont des arbres ; ils font partie de la famille des malvacées. Leurs fleurs se consomment en infusions calmantes. Taxon : Tilia
Le vocabulaire du Moyen Âge
5 citations
|57
Ce sont probablement les croisés qui ont sorti le croissant du vaste répertoire de figures emblématiques utilisées par les musulmans et qui l'ont promu [comme] seule figure s'opposant à la croix.
72
Dans un sens […] propre à la poésie lyrique, une reverdie est une pièce de vers qui chante tout ensemble le retour des beaux jours, l'impression de bonheur qui s'en dégage et la naissance du sentiment amoureux.
81
Au printemps, damoiseaux et damoiselles aiment se retrouver au verger, lieu du badinage amoureux, de l'exaltation des sens et des rendez-vous secrets.
DAMOISEAU, X
n.m. n.m. « Convention que deux ou plusieurs personnes font de se trouver ensemble certain jour, à certaine heure, en un lieu désigné. » dixit Académie 8
81
La déesse Minne], personnification propre à la poésie lyrique de langue allemande à laquelle elle a donné son nom : minnesang (mot à mot "chant d'amour").
87
Contrairement à la joute, le tournoi se déroule dans un espace ouvert, à l'orée d'une forêt ou bien sur l'étendue d'une lande, voire sur une vaste prairie.
n.m. #Médiéval « Fête militaire où les chevaliers du moyen âge déployaient leur adresse en joutant ou en combattant les uns contre les autres. » dixit Littré
n.f. #Botanique « Terrains incultes couverts de bruyères, de genêts, de fougères et autres plantes spontanées de peu de valeur. » dixit Littré
Le vocabulaire de la Rome antique
4 citations
|35
Sénèque tourne ainsi en ridicule décor nouveau des thermes et des lieux de bains, où les hommes sont nus mais où "les murs sont habillés comme des paons".
37
Néron […] n'observait pas les gladiateurs au travers d'une émeraude, ni d'une pierre de béryl moins colorée mais finement taillée : il n'aurait rien vu, ou pas grand-chose.
GLADIATEUR, TRICE
n. #Antiquité#Romaine « Il se disait des hommes qui dans les jeux du cirque, à Rome, combattaient volontairement ou de force pour l'amusement des spectateurs, avec des armes meurtrières, soit entre eux, soit contre des bêtes féroces. » dixit Académie 838
Lorsqu'il se rend à l'hippodrome pour participer aux courses de char, [Néron] revêt la casaque de l'écurie verte, la fameuse factio prasina dont Pétrone se moque dans le satiricon.
n.m.
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- #Antiquité#Romaine « Cirque disposé pour les courses de chevaux et de chars. » dixit Académie 8
78
Chez les Romains, c'était Flora, déesse des fleurs, qui était à l'honneur ; pendant cinq nuits consécutives, des jeux floraux, les Floralia (floralies, NDLR), lui étaient consacrés.
Le vocabulaire du catholicisme
48
Par la suite, un vestiaire spécifique fait son apparition (amict, aube, étole, chasuble, manipule) mais étoffes et vêtements ne sont pas teints, la couleur passant pour impure.
n.m. Habillement #Catholicisme « Petite bande d'étoffe que le prêtre catholique porte au bras gauche en célébrant la messe. » dixit Littré
n.m. #Catholicisme « Linge bénit que le prêtre met sur ses épaules pour dire la messe. » dixit Littré champ : blanc
n.f.
- #Catholicisme « Longue bande d'étoffe que les officiants portent au cou, lorsqu'ils remplissent certaines fonctions ecclésiastiques, et qui pend des deux côtés par-devant. » dixit Académie 8
- …▼
n.f. #Catholicisme « Vêtement que le prêtre met par-dessus l'aube et l'étole pour célébrer la messe. » dixit Académie 8
Divers
15
Lexique, étoffes, teintures : en matière de couleurs, les poètes et les teinturiers ont au moins autant à nous apprendre que les peintres, les chimistes ou les physiciens.
28
La teinturerie romaine, bien que mieux maîtrisée que celle des Grecs, n'est vraiment performante que dans la gamme des rouges et des jaunes.
29
De splendides tons bleu-vert que l'on peut voir sur le petit mobilier funéraire […] souvent revêtu d'une glaçure qui lui procure un aspect vitreux et précieux.
30
Le vert est la couleur d'Osiris, dieu funéraire mais aussi dieu de la terre et de la végétation.
31
Faute d'un mordançage efficace, la matière colorante pénètre mal dans les fibres textiles, et la teinte se décolore assez vite.
34
Dans la Grèce comme dans la Rome antique, la polychromie était violente et recouvrait presque tout.
35
Le bariolage surtout est rejeté, même lorsqu'il s'agit de simples rayures textiles ou d'un décor en forme de damier.
À propos de ce livre
La couverture (en haut de la présente page) correspond à l'édition beau livre (parue chez Seuil en 2013).
Les numéros de page (ci-dessus) correspondent à l'édition poche (parue chez Points en 2020).
| Titre | Vert ~ Histoire d'une couleur | Auteur | Michel Pastoureau | Année de parution | 2013 | Éditeur original | Seuil | Année de cette édition | 2020 | Éditeur de cette édition | Points | ISBN | 978-2-7578-8706-6 | Nombre de pages | 221 |
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une tonalité ?
- Dico vert
- 22 mots
Chez les poètes antiques, une vraie couleur, c'est surtout une couleur fabriquée (cf peinture et teinture), pas une couleur présente dans le monde naturel.
Dans la Rome antique, on n'aime pas spécialement le vert (à la différence des Germains (les barbares), et des Égyptiens).
"La traduction des termes de couleur est toujours une trahison."
À propos du vert en tant que couleur de l'Islam : les tapis ne sont jamais verts, car on ne piétine pas une couleur vénérable.
Pour la sensibilité médiévale, les couples rouge/vert et rouge/jaune ne présentent pas un contraste fort.
En Occident, le vert est symbole d'espérance depuis longtemps. Dans la Rome antique, on enveloppait parfois de vert le corps d'un nouveau-né.
Le vert est aussi la couleur de l'espérance de maternité et des enceintes (cf le tableau Les Époux Arnolfini).
Michel Pastoureau s'interroge sur la faible présence du vert dans les armoiries, d'autant plus surprenante qu'il s'agit d'une couleur valorisée par la chevalerie. Plusieurs hypothèses :
La Réforme protestante place le vert dans la catégorie des couleurs immorales.
Aspects négatifs des pigments verts :
Depuis quand les peintres mélangent-ils du bleu et du jaune pour faire du vert ? Apparemment, depuis récemment. Aucun document de l'Antiquité ou du Moyen Âge ne témoigne d'une telle pratique. Et aucune analyse en laboratoire non plus. La chose est devenue théorique suite à la découverte du spectre (par Newton, en 1666) : là, le vert se situe entre le bleu et le jaune. Au XVIIIe s. des manuels de peinture parlent de fabriquer du vert à partir de bleu et de jaune. En revanche, certains enlumineurs procédaient ainsi dès le XIVe s.
Le siècle des Lumières ne brille pas seulement par l'esprit : les éclairages s'améliorent, les couleurs se voient mieux.
Au XVIIIe s., la mode du bleu est néfaste au vert, car on prétend que ces deux couleurs s'accordent mal (cf le proverbe anglais Blue with green should never been seen). De plus, à la lueur des chandelles, le vert risque de brunir ou de s'affadir. Sans compter la mauvaise réputation que traine toujours le vert (couleur chimiquement dangereuse et couleur démoniaque).